Voir le jour
La pure observation des images ne le revèle pas, ce sont les
mots de l'auteur qui le dévoilent; ces photos ont
été prises dans des espaces fermés et sombres :
des citernes.
Citernes, telles des cavernes, des girons obscurs dans lesquels pour
une fois on naît en entrant. C'est peut-être pour cela
qu'on renaît.
Citernes, telles des chambres noires, où l'origine du
photographe et de la photo se superposent et coïncident ; c'est
bien pour cela qu'ici la lumière naturelle du monde ne peut pas
entrer par elle-même : c'est le photographe qui l'y
conduit.
Il est bien plus que l'auteur des images, il est le responsable de leur
existence. Elles dépendent totalement d'un acte de
volonté, qui se situe bien avant et au-delà de la coupure
produite par le déclencheur. Nées par l'expérience
consciente des lieux où les valeurs symboliques et les
suggestions des matières s'enchevêtrent dans leur
même traduction en images, elles se déposent comme des
sédiments sur les parois de ces citernes, calcaires et
goudronneuses en même temps ; dépourvues de toute
échelle de représentation et pour cela ouvertes à
nos idées d'interprétations; des silhouettes que nous
reconnaissons dans notre imaginaire comme au passage des nuages. Des
ombres dont nous ne comprenons pas l'origine et dont l'idée
exacte d'obscurité ne remonte à notre conscience que lors
d'un deuxième regard plus attentif. Le noir comme absence
de matière qui se fait teinte plate, détail de
composition qui n'a aucune valeur descriptive. Cette distance voulue de
toute intention narrative nous montre clairement la matrice des travaux
de Claudio Isgrò : dans la photo qui à partir du XXe
siècle s'est appelée subjective, s'opposant au
réalisme présumé des tendances populistes ainsi
qu'aux logiques des moments décisifs, en faveur d'une autonomie
de l'image qui, engendrée de la réalité, ne
désire plus y retourner.
Générée comme trace elle se transforme en autre
chose qu'un index : la photo ne montre plus qu'elle même.
En suivant l'ancienne leçon de Minor White, "une séquence
de photos fonctionne alors comme un petit drame de signes au moyen
d'une mémoire. La ligne souple entre réalité et
photo a été inexorablement tirée, mais elle n'a
pas été coupée. Ces abstractions de la nature
n'ont pas laissé le monde des apparences, car en ce faisant
elles briseraient le point de force de l'objectif, son
authenticité ».
Pierangelo Cavanna
Traces
Claudio Isgrò recrée et reproduit avec obsession sa
propre ombre, à main libre, sur des matériels
photosensibles. Il réalise des "chimigrammes" dans lesquels
s'épuisent des gestes amples, automatiques, non
prémédités. Graduellement il se
libère de l'appareil photo comme d'une cage et il se sert
de techniques off-camera en tant que démarche
propédeutique à une nouvelle définition de sa
propre identité. Toute prise de conscience détermine
l'intervention d'une variable : l'ombre perd son opacité et
devient contour, ensemble, agrégat de traces.
Un travail in progress. Irréversible.
Laura Manione
(critique de la photographie)
Extrait du texte du catalogue de la "Quinzaine Photographique Nantaise
2003
Claudio Isgrò
Comme un explorateur sur son carnet, Claudio Isgrò signale sur
le papier photographique les étapes d'un long itinéraire
introspectif. Un voyage entrepris pour laisser derrière lui les
territoires de la photographie conventionnelle et franchir des espaces
lui permettant une recherche libre de contraintes et d'homologations,
une route vers des régions où il est encore permis de
créer un habitat respectant son unicité et ses exigences
expressives personnelles.
Durant son parcours, l'intense – mais pertinente –
expérimentation technique s'avère ainsi opération
nécessaire pour évaluer l'aptitude de la photographie
à l'auto représentation, la vérification d'un
instrument pour révéler et, surtout, attester une
identité. L'intarissable système d'images, qui en
découle, assume l'aspect d'une carte intime, autant
embrouillée que fascinante à déchiffrer.
Laura Manione
(critique de la photographie)
Extrait du texte du catalogue de la "Quinzaine Photographique Nantaise
2003"
PAYSAGES INFINIS
C'est un geste simple.
On prend une feuille et on la partage en deux par une ligne.
Lentement un paysage commence à apparaître. Terre-ciel,
mer-terre, mer-ciel.
C'est l'idée de base de mon travail. Paysages du monde
intérieur.
J'ai travaillé avec le mode photographique sans employer le
moyen photographique.
Acides, lumière, papier sensible et avec une fenêtre
carrée j'ai recherché le paysage.
Une feuille équitablement partagée en deux.
Une partie plus claire et une partie un peu plus foncée. La mise
au point est sur la ligne de séparation-union entre les deux
parties. Zone vivante.
C'est le point où la rencontre se fait. Homme-femme, jour-nuit,
lumière-ombre.
Ligne d'équilibre et d'harmonie, mais aussi lieux du doute et
des choix.
Un non-point de ciel, mer et terre.
Zone ou tout est et rien n'est.
Claudio Isgrò
VISIONS (2000)
Au-delà des contacts il y a les visions.
Sensations en équilibre entre ventre et tête.
Images révélatrices de mondes inconnus qui, seulement par
instant, affleurent et demandent un moment d'attention.
Il mio lavoro ha come tema l'identità, indagata e analizzata nel
tempo con varie tecniche di rappresentazione. L'identita' tra
consapevolezza e ricerca, intesa come viaggio della conoscenza di
sè e del mondo
Le immagini che le invio sono solo una piccola parte. Il lavoro totale
sara' un'installazione dove saranno presenti fotofrafie classiche,
interventi digitali, pittura con acidi fotografici e una serie
difotocopie.
Mon travail a comme thème l'identité,
enquêtée et analysée dans le temps avec des
diverses techniques de représentation. L’identité entre
conscience et recherche, l'accord comme voyage de la connaissance de
soi et du monde.
Les images que l'on envoie sont seulement une petite partie. Le travail
total est une installation où sont présentées des
photographies classiques, interventions digitales, des peintures avec
des acides photographiques et une série de photocopies.
Tout commence avec une fenêtre pour encadrer le monde.
Puis sont arrivés quelques objets, est arrivé le signe
qui apporté avec lui les paroles.
On a une certaine idée du départ.
De l'arrivée on ne connaît rien.
C'est un peu le jeu des croisements, il faut prendre une
décision.
Aller à droite ou à gauche, peut être le jeu de la
vie....