J’aime les lignes sur les galets des
rivières, les vues de la planète, la lumière sur
les pierres.
Je tente de retrouver, dans les souvenirs enfouis, les lignes et les
couleurs par la magie du geste, l’emploi de materiaux differents :
pigments, vernis bois, encre d’imprimerie, et ainsi de nier la
frontière entre figuratif et abstrait.
Sans école fixe
En France, l’école est obligatoire
jusqu’à seize ans. En principe. Pourtant, nombre de jeunes de
moins de seize ans ne sont pas scolarisés. Ruptures et
déchirures familiales, décès, maladie, exil,
abandons… Les causes de cette situation sont rarement uniques.
La
déscolarisation est un symptôme parmi d’autres.
Révélateur d’un vécu de crise et de souffrance. Et
les jeunes concernés, avec leurs parcours scolaires en
pointillés, posent problème à l’école qui
semble, dans beaucoup de cas, impuissante à les intégrer.
Jean Pierre Montaron les a rencontrés pendant
les années où il exerçait la profession de
conseiller d’orientation-psychologue auprès du Tribunal pour
enfants d’Evry. Longuement, il les a écoutés dire leur
rejet d’une école qui les rejetait. Leur sentiment de ne pas y
avoir leur place. De ne pas avoir d’avenir, ou si peu. Patiemment, il a
exploré avec eux les voies d’une possible rescolarisation, a
accompagné leurs tentatives souvent infructueuses, toujours
laborieuses, pour reprendre le chemin de l’école.
Il a conservé, sous forme
de notes, la trace des nombreux entretiens qu’il a eus avec les jeunes,
leurs parents, leurs éducateurs.
« Les cours, c’est pas mon truc. »
«
En classe, j’avais zéro sur zéro. »
«
J’ai envie de rien. »
«
J’ai pas d’école. »
«
Il faut que je trouve une école. »
«
Pour l’avenir, je ne sais pas… »
Des fragments de discours, des paroles souvent
véhémentes, parfois proches du cri, retranscrits par ses
soins, ont été rassemblés dans un livre, à
ce jour non publié.
Et parce que l’art plastique
constitue pour Jean Pierre Montaron un moyen d’expression
privilégié, ces textes, revêtus de couleurs, de
lumière et d’ombre, se sont faits images. Pour que les voix qui,
non sans peine, disaient la honte, la douleur et les aléas de
l’espoir, ne restent pas inouïes.