Je peins au moyen d'essuie-glaces, de joints caoutchouc d'automobiles, d'éponges ou encore de morceaux de matelas mousse.
Pourquoi? Je ne sais pas. Cela est venu comme ça, je souhaitais un outil entre le couteau et la brosse.
Résultat? Abstractions d'ombres et de transparences donnant naissance et libre court à mes émotions.

Je prépare mes supports à partir de matériaux de récupération, à la fois par goût et par principe, mais avant tout  parce que la récupération offre un espace de libertés et d'imprévus.
Espace dans lequel, le conscient, l'inconscient, le sens pratique, l'imaginaire, le libre-arbitre, l'instinct...c'est à dire le corps et l' esprit tout entier peuvent être, de concert, en action pour ma peinture.

J'attends de ma peinture non pas qu'elle prenne de la place en moi mais qu'elle en fasse.
Plutôt que d'exprimer mes états d'âme, qu'elle affirme son identité par son espace et sa lumière.
J'apprends qu'elle est achevée lorsque je respire librement, calmement devant elle.
Le plexus solaire vibre, le sourire est aux lèvres.
C'est ainsi que je goûte l'espace et la lumière qu'elle m'offre pour présent.
C’est ainsi que ma peinture naît.
En me salissant les mains, elle me lave le coeur.

C'est à 6 ou 7 ans que j'ai éprouvé le premier contact conscient avec la peinture.
Avec l'acte lui même, c'était en couvrant de blanc le vieux radiateur de la cuisine familiale.
J'ai appris là que la peinture vit et donne vie.
Le second choc eut lieu en tant que spectateur, à peu près au même âge, chez un oncle.
IL y avait dans le salon un tableau, représentant à l'orée d'un bois, un cerf. Je jure l'avoir vu vivre.
A présent, l'abstrait, sans mots, sans discours me dit ce qui est, ce que je suis, ce que je vis.

Peindre, c'est écouter, être attentif aux imprévus, aux émotions qui nous animent.
L'art à ce pouvoir, par les changements et découvertes intérieures qu'il nous offre de vivre, de nous apprendre, peu à peu, à évoluer vers la maîtrise de soi.


Eric Garnier-Audebourg,


Toulouse juin 2005